Partie 4 - ça sent la fin : Moalboal
Chacun aura remarqué le titre de ce CR, se réveillant au fond de la classe, j’entends une voix diffuse m'interpeller : « et les vieux allemands en speedo, ils sont où ? ».
Bien, bien, bien… veuillez remarquer que ce CR n’est pas terminé, laissez-moi donc le temps de développer le concept de « vieil allemand en speedo ».
Dernier stop Moalboal, c’est là que les choses se corsent disait le kaiser Napoléon. Vous me permettrez un peu de littérature pour faire état complet de mes sentiments.
Moalboal, c’est un spot où je suis souvent revenu pendant 15 ans. Il bénéficie durablement d’un des plus beaux spots des Philippines, l’ile de Pescador, tombant de coraux sublimement colorés, le seul spot qui dans mon carnet de plongée ait jamais reçu la note de 10/10 : plongée parfaite.
Il dispose également de façon moins durable de la colonisation du récif par un banc de sardines de quelques dizaines, (centaines ?) de millions d’individus formant un mur compact et noir de poissons, ceci juste en face des bars interlopes. Phénomène qui a commencé à drainer les foules comme deuxième attraction de Cebu sud, juste après le cirque des requins baleine d’Oslob, pas très loin de là d’ailleurs, à 2-3h de route.
Moalboal c’est aussi un village en bord de mer appelé Panagsama, fait de bars à tapins de tous sexes y compris du troisième, de centres de plongée plus ou moins qualifiés et d’hôtels pas trop luxueux destinés au seul plongeur hardcore (et à son -ses- tapin(s) ) tant la nature n’est pas tendre avec ce coin des Philippines, révolu de plages qui n’en sont plus. Relativement proche de Cebu et de son aéroport, c’est également le spot le plus facile d’accès terrestres à 3h de transfert.
Historiquement il y a une quinzaine d’années, la mode à Panagsama était à la coupe mulet et ‘stache Rudi Völler (Al-leeez l’O-hémeuuuh), au marcel noir imprimé Scorpions, à la choppe bavaroise, à la combi de plongée noire, au speedo et aux saucisses de toutes tailles. On plongeait beaucoup, on plongeait profond, on plongeait dru.
Quand on criait dans la rue «Kalle ! » il y avait de forte chances qu’au moins trois moustachus en speedo se retournent, croyant avoir été appelés par leur nom .
En ce temps, Panagsama était capitale mondiale de la pancake à la mangue servie dans un poëlon au Cabanas, je fréquentais aussi un centre appelé Savedra dirigé par un certain Kalle. J’avais été certifié IANTD Nitrox (le premier en France, si, si !) et fait ma première plongée pratique nitrox à 40m avec un instructeur appelé Kalle (un autre Kalle , je précise). Aucun client sauf moi ne prenait de cours, quelle rigolade, j’étais un newbie avec mes 200 plongées d’alors!
Il n’avait fallu qu’une fracture du péroné en sautant du bateau pour que la cliente fidèle de 60 balais ( c’est quoi le féminin de Kalle ?) et une murge historique de l’autre client (un certain Kalle que les guides philippins avaient vu raccompagné à l’aube par les ladyboys du billard) pour que je sois seul à 7h du mat’ avec Kalle l’instructeur (vous suivez) et profiter de cette plongée sur Pescador notée 10/10.
Bref Moalboal/Panagsama était resté quelque part dans mon panthéon.
15 ans plus tard, après 4 heure de route et une traversée sur une barge depuis Dauin/Dumaguete nous revoilà donc à Panagsama, village plongistique,chez Marcosas Cottages un complexe de bungalows où tout est écrit en allemand, disposant d’une piscine qu’on dirait construite sur plan d’ ex RDA pour son magnifique entourage bétonné et ses transats sur carrelage authentiques.
Les clients vautrés autour se fondent dans l'ambiance : ce ne sont autres que les cousins germains de Kalle, atteints par le temps, ayant troqué la pratique intensive de la plongée pour le tutoiement frénétique de la pinte de blonde (échauffement diurne avant de commander le soir « El grande », la bouteille d’un litre de San Mig), si bien qu’ils arrivent tous ex aequo sur le podium du plus beau bide à bière.
Leurs Wundermadchen ne sont pas reste, qui serais-je pour contredire 175cm et 95kgs de féminité ? Ceux des vieux gredins qui ont laissé Frida à la maison se baladent avec des petits lots cupides et philippins qui leur extorquent au compte-goutte leurs derniers deuscheMark planqués sous les matelas, à force d’assiette sucrées ou huileuses commandés à des heures improbables ou de l’achat bimbeloteries ridicules.
D’ailleurs les Kalle non plus ne contredisent plus rien : ils sont défaits devant le temps qui passe, les effets de la gravité sur l’élasticité abdominale, fascinés par l’antigravité des fesses des philippines et surtout dépités par l’invasion de leurs centres de plongée préférés par une nouvelle génération de branleurs attirés par la profusion d'hostel et dortoirs cheap qui se sont développés dans le coin.
Venons-en au fait : la plongée à Moalboal a coulé, ç’aurait pu être attendu mais c’est une mauvaise nouvelle.
Savedra que j’avais booké a été repris par un Anglais qui regarde de loin s’agiter un nombre étonnant de jeunes instructeurs tout péteux, frais émoulus «vivant leur rêve» comme dit PADI, qui en combinaison camouflage, qui d’autre piercé de frais. Beaucoup de français dont on se demande quel monde imaginé leur langage corporel semble dominer.
Quelques autres de nationalités diverses, une espagnole, un bulgare par exemple (un guide/instructeur bulgare… ?!) le seul qui m’ait adressé la parole et qui m’a dit qu’il était là depuis seulement 2 mois…
Non seulement aucun accueil, alors que le regretté Kalle serrait la louche à tous ses clients, leur faisait faire le tour du proprio pour leur montrer les dispositifs de sécurité, où était l’oxygène, etc.
Mais aussi tout devient impossible, par exemple de laisser mon caisson pour la nuit, pa sde bureaux me dit-on ... même si la plupart de péteux se réfugiaient dans un bureau climatisé idoine pour icelui caisson. «
Non c’est pas possible » m’a lancé depuis ce bureau un branleur qui n’a pas jugé souhaitable de bouger son cul de sa chaise pour venir me le dire en face, on m’a proposé à la place de mette mon caisson dans le local où ils stockaient l’essence (le local à essence !!!! Même la filipina m’avertit diplomatiquement que ça ne « ferait peut être pas l’affaire pour moi ») .
Comme je rappelle que j’ai booké un guide privé, on me demande donc si je veux un guide français. «
Surtout pas !!! je veux un guide experimenté »… pas dupe la filipina me répond avec un sourire en coin «
je comprends ». Si même les Philippins s’y mettent….
Donc j’hérite de Mark, ptit gars filipino qui n’en veut. Ce sera le seul bon point.
Je regarde le planning des bateaux et je m’étonne que la plongée du matin ne soit pas prévue sur Pescador comme au temps de Kalle mais sur un site infigne d'intérêt que je rejette de suite. Pas grave, Marke et moi on démarrera solo de bon matin par les sardines en shore dive, il suffit de porter sa bouteille 30m, de nager 20m et pffuit voilà nous nageons tout seuls au milieu de quelques millions de poissons, les snorkeleurs de l’enfer ne sont pas arrivés. Je fais genre 90 images et puis j’en ai marre, il n’y a plus un seul corail de vivant, quand les sardines seront parties, ce sera le pire spot de plongée des Philippines.
Après une pancake à la mangue Je prends donc la plongée de 10:30 sur Pescador, le bateau est bondé de faux plongeurs tatoués et leurs imposteurs de guides gringos alors que j’ai Mark pour moi tout seul. Mais l’imposteur en chef décide de prendre le mauvais côté de Pescador, je demande à Mark que l’on aille en sens contraire, ce qui le contrarie aussi, me vaut un mauvais coup d’œil du tatoué camouflé mais je dis genre tout haut que le côté choisi n’est pas bon pour la photo, et au bluff indique là où sont placés les giant frogfish sur la base de ce que je connaissais de ma dernière plongée d’il ya 5 ans… Visiblement ça marche, le tatoué pique du nez voyant que je connais le site probablement mieux que lui. Je propose à Mark d’aller dans le direction que je veux et de rebrousser chemin pour continuer là où le bétail va refaire surface. Ça à l’air de lui sauver la mise, c’est OK et validé par tout le monde.
En fait mon plan au flan, c’est bingo.
Non seulement on est les seuls mais on va se faire une enfilade de 4 gros froggies vers les 35m, là où aucun des péteux ne va puis on tombe nez à nez dans les 30m avec ce que je croyais une légende urbaine : une danseuse espagnole de 40cm (j’ai mesuré par rapport mon avant bras) !!!
On remonte pépèrement mais contents, pour continuer la plongée selon l'idée initiale du tatoué qui est désastreux : non seulement son plan n’était pas bandant mais en l’absence complète de courant les coraux sont en manque complet de viagra, flacides et vautrés comme des prostates molles sur les murs. Juste le temps de croiser une tortue et puis voilà, au moins on aura été les seuls à voir quelque chose, à pouvoir le dire sous les yeux mi penaud mi furax du troué.
En revenant je demande à faire une plongée le lendemain sur Pescador le matin tôt avec du courant. Pas possible me répond-on : on va sur un site (ingrat et peu profond) qui ne m’intéresse pas, il n’y aucun inscrit donc je réitère ma demande, re-pas possible, raison que c’est prévu comme ça et qu'on fait les plannings à l’avance me dit-on.
En fait j’apprends par le bulgare que c’est pour avoir le maximum de clients que les plongées sur Pescador sont prévues en deuxième, de façon à ce que les millenials feignasses soient réveillés. Ces pauvres chounes, faut pas les priver de leur tartine de Nutella sinon ils sont tout chonchon...
Bref j’annonce que je vais me barrer devant si peu de flexibilité et au vu de l’incompétence du planning qui prévoit les plongées les plus profondes en profil inversé en deuxième plongée. Je voulais quand même faire une plongée de nuit avec Mark, même si l’état des murs me désole…
Bin Mark il fait son taf correct on trouve pas mal de crustacés, de cowries et surtout un critter qui me fuit depuis pas mal de temps le batfish juvénile, je pense voir un vers plat nage dans le noir quand je me rends compte qu’il s’agit d’’un poisson juvénile, mark a bien capté et m’éclaire bien pour je puisse faire le point.
Impecc !! il aura son pourliche de 500PHP même si on n’a pas beaucoup plongé ensemble.
Le lendemain, je vais juste en face de mon hôtel il y a un club allemand qui propose Pescador le matin, cool… sauf que 12 plongeurs coréens y sont déjà inscrits. Il y a aussi 3 allemands en speedo, je les reconnais à leur bide à bière et d'ailleurs ils sont dans mon hotel aussi. Malheureusement ils veulent plonger le mauvais côté de Pescador, le même que celui du tatoué, tant pis je vais avec les coréens… voyant ma tronche dépitée en regardant les coréens s’équiper sur le bateau et jouer avec une figurine de superman en palmes que l’un deux emmène en plongée (wtf)
un instructeur allemand me prend en pitié il est serre file de queue et me propose de plonger avec lui. Alles Gut !
On est sur le même chemin que le veille, je retrouve facilement le premier frogfish, à peine je m’approche que je sens une palme me battre le haut du crane, je vois une go pro devant mon champ de vision, je me retourne je suis encerclé de coréens qui me poussent, me devancent, s’accrochent…
c’est pas beau à voir, c’est l’enfer aquatique…
Et ainsi de suite sur le parcours, je vais relativement peu prendre de photos, sur le platier en fin de plongée c’est le jacuzzi, une chinetoque ou autre asiatique mal finie, a pris une étoile de mer pour la remonter sur son bateau (un autre que le mien sinon je pense que j’aurais un peu gueulé).
Donc bref ça sentait la dernière plongée, les vacances qui s’achèvent et le rangement du matériel avant que j’en assassine un(e) à coup de caisson sur le coin de la tronche.
Vous m’avez suivi : Moalboal c’est à éviter en attendant que Kalle et tous les allemands en speedos reviennent en fendant les flots de leur mule fièrement arborée, pour que Moalboal redevienne une destination plongée digne de ce nom.
Si toutefois vous vous êtes perdus à Panagsama, Cameron est le boss très sympa de Cebu Divers, je n’ai pas plongé chez eux, ils étaient complets, mais vu le personnage qui regrette aussi le Kalle orginal, je pense qu’on aurait pu s’entendre.
La seule alternative potable pour diner c’est Café Cebuana, ils ont un tataki de thon au sésame exceptionnel. Allez aussi faire un tour chez Sébastien, Café Français où l’on sert des crêpes et un cheesecake au chocolat (avec du vrai chocolat et de la vraie crème dit Sébastien) mais où l’on refuse de servir des boissons gazeuses sucrées, et qui organise des transferts vers Cebu sans commission.
Sinon on peut quand même prendre des photos sous l’eau.
M1- Trouvez l’intrus.
M2- Mark et les sardines
M3- 22, vla les snorkeleurs
M4- La peur du chasseur
M5- Plongée de nuit.
M6- Pescador avec un peu de courant pour activer les alcyonnaires
M7- Pescador version coraux durs
M8- Gros frogfish gris
M7- Une danseuse espagnole grosse « comme ça »
M8- Une tortue sur Pescador et des pignoufs derrière
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