EPISODE 3:
Après cette série de clichés du Pit carrément… piteux

, nous prenons le chemin de Dos Ojos, sans sourciller

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Dos Ojos, comme son nom l’indique, est un cénote qui possède deux vasques circulaires à ciel ouvert, connectées par un réseau souterrain. En fait, il existe dans la galerie une troisième salle couverte, dont le plafond sert de refuge à plusieurs colonies de chauve-souris, une grotte qu’un spéléo aussi inspiré qu'un expert-comptable a décidé de baptiser Batcave

. Nous ferons 2 plongées sur ce site, un premier tour en suivant la Barbie Line (impossible d’échapper à la bimbo péroxydée cet été, même à 30m sous terre, il faut se faire une raison

) et donc Batcave, pour aller chatouiller du chiroptère. L’enchaînement Pit-Dos Ojos est recommandé, car il invite le plongeur à faire le grand écart sur l’échelle du cénote. Autant le Pit est narcotique, rayonnant et austère, autant Dos Ojos est superficiel, obscur et concrétionné. Les plongées se déroulent entre 5 et 10m à travers un petit labyrinthe karstique. La calcite s’en donne à cœur joie et tout le bestiaire minéral y passe, des stalactites aux stalagmites, en passant par force colonnes et draperies centenaires. Le plongeur est le témoin des exubérances du temps dans la relation empreinte de triolisme entre l’eau, l’air et le carbonate de calcium.
Dans un tel environnement, du côté photo, il faut choisir son combat. La lumière pénètre très peu dans les galeries. Alors soit on y va au flash pour éclabousser le calcaire et on ressort avec une collection de spéléothèmes pris à bout portant, sans profondeur de champ, tout juste bons à illustrer la page éponyme de wikipedia (et dans ce cas j’ai tendance à croire qu’une visite à l’Aven Armand vaut mieux qu’une virée au Yucatán), ou alors on cherche à capter l’ambiance cryptique des cavernes immergées et il faut ranger les flashs pour sortir le trépied des profondeurs. Vous aurez deviné mon inclination naturelle pour la seconde option, mais faute de trépied, je me résous à pousser le R5 dans ses retranchements les plus photosensibles. On va flirter avec les 12800 ISO, ouvrir au max (entre f4.0 et f8.0) et baisser la vitesse aux limites de la stabilisation. Je n’ai plus qu’à espérer que mes compagnons de palanquée se tiendront tranquilles pour rester nets au 1/15s, mais a priori quand tu nages à la loupiote dans une forêt de dentelles calcaires aiguisées comme des couperets, ça te passe l'envie de jouer les Michael Phelps. Donc ça devrait jouer.
Dans ces ambiances de catacombe, je suis impressionné par la qualité de l’EVF qui me restitue exactement ce que le capteur est censé recevoir. Dans ces ténèbres, le R5 y voit mieux que moi avec mes dos ojos! Tout au long du parcours, on garde les vasques en ligne de mire. La lumière qui en parvient est d'un cyan électrique. Dans certaines salles, les effets miroir des concrétions calcaires sur la surface sont sublimes. Des symétries improbables surgissent lorsque les stalagmites percent le ménisque et se métamorphosent en monolithes suspendus dans un espace-temps fluide (cf.35). Les scènes sont éclairées par le peu de lumière ambiante et les faisceaux des torches inquisitrices. Le nouvel outil de correction du bruit par IA de Lightroom fera le reste. Le résultat est étonnant, parfois improbable, et le noir et blanc reste une bonne alternative je trouve. Une seule plongée en palanquée en mode balade sur un tel terrain de jeu n’est pas suffisante pour en tirer le maximum sur le plan photographique. Il faudrait prendre le temps, comme bien souvent. J’en suis ressorti avec plein d’idées de réglages et de compo… mais ce sera pour un prochain voyage.
DOS OJOS:
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